Vus en coupe et à l’état frais, les os présentent une teinte, tantôt rougeâtre, tantôt jaunâtre ou grisâtre, due à la présence dans leur épaisseur d’une substance molle et diversement colorée, appelée moelle. Cette substance est renfermée dans des cavités de grandeurs fort diverses, que circonscrivent des lames d’une substance dure, la substance osseuse ou tissu osseux proprement dit.
Différentes variétés du tissu osseux
La substance osseuse proprement dite est une substance de coloration blanchâtre, de consistance ligneuse, se présentant, suivant les points où on l’examine, sous trois aspects différents et formant ainsi trois variétés : le tissu compacte, le tissu spongieux et le tissu réticulaire. — Le tissu compacte (fig. 1,3) est constitué par des lamelles osseuses immédiatement appliquées les unes contre les autres sans cavités intermédiaires. — Le tissu spongieux (fig. 1/1) est formé, lui aussi, par des lamelles, mais par des lamelles orientées en sens différents, n’entrant en contact que sur certains points et, de ce fait, ménageant entre elles un système de petites cavités où s’amasse la moelle. A cet état d’organisation le tissu osseux est creusé intérieurement comme l’est une éponge, d’où son nom de tissu spongieux. – Le tissu réticulaire (fig. 1,2), enfin, n’est qu’une variété du tissu spongieux, un tissu spongieux dans lequel les cloisons osseuses sont plus espacées et les cavités intermédiaires plus grandes.
Ces trois variétés d’aspect que nous présente le tissu osseux, tissu compacte, tissu spongieux et tissu aréolaire, résultent tout simplement d’une disposition architecturale différente de la substance osseuse. La structure intime du tissu, comme nous le verrons dans le paragraphe suivant, est partout la même.
Voyons maintenant comment s’agencent les différentes variétés du tissu osseux dans chacun des trois groupes d’os, les os longs, les os larges et les os courts.
Conformation intérieure des os longs
Les os longs, nous le savons déjà, se composent chacun d’une partie moyenne, le corps ou diaphyse, et de deux extrémités plus ou moins renflées, les épiphyses. Pour prendre une notion exacte du mode de constitution de chacun de ces segments de l’os, il suffit de pratiquer sur celui-ci une coupe longitudinale passant par son axe (fig. 1).
- Épiphyses. — Les épiphyses, tout d’abord, nous apparaissent comme formées presque exclusivement par du tissu spongieux. Ce n’est qu’à la périphérie, je veux dire dans la partie qui confine à la surface extérieure de l’os, que le tissu spongieux épiphysaire est doublé par une mince couche de tissu compacte. Cette coque périphérique de tissu compacte fait défaut naturellement au niveau du point où l’épiphyse se réunit à la diaphyse. Elle fait défaut aussi, au niveau de son extrémité libre, sur tous les points où se trouve du cartilage articulaire.
- Diaphyse. — La diaphyse est essentiellement constituée par du tissu compacte. Mais ce tissu compacte n’occupe que la périphérie de l’os. A son centre se trouve creusée une cavité longitudinale (fig. 1,4), qui s’étend ordinairement jusqu’aux épiphyses et parfois même empiète sur elles : c’est le canal médullaire, ainsi appelé parce qu’il loge la moelle osseuse.
Il est à remarquer que le canal médullaire a une forme cylindroïde et que sa coupe transversale est plus ou moins circulaire. Il en résulte que la conformation du canal ne reproduit nullement celle de l’os, lequel est le plus souvent prismatique triangulaire. Il en résulte aussi, comme corollaire, que l’épaisseur de sa paroi (fig. 2) est plus grande au niveau des bords de l’os qu’au niveau de ses faces.
A l’une et à l’autre de ses extrémités, le canal médullaire nous présente ordinairement un système de minces lamelles qui vont d’une paroi à l’autre en s’entrecroisant sous les angles divers et en circonscrivant entre elles de larges aréoles : c’est le tissu aréolaire du canal. Du côté du centre de l’os, ce tissu aréolaire se raréfie de plus en plus et finit par disparaître. Du côté opposé, au contraire, les travées se multiplient en même temps que les aréoles deviennent plus étroites et c’est par des gradations insensibles que le tissu aréolaire se continue avec le tissu spongieux de l’épiphyse. Rappelons en passant que c’est au canal médullaire qu’aboutissent les conduits nourriciers de l’os, dont il a été question plus haut.
Conformation intérieure des os larges
Les os larges ou os plats se composent essentiellement de deux lames de tissu compacte, occupant les deux faces opposées de l’os et emprisonnant entre elles une couche plus ou moins épaisse de tissu spongieux. Au niveau des bords de l’os, les deux lames de tissu compacte se fusionnent réciproquement l’une avec l’autre, de telle sorte que le tissu spongieux se trouve enveloppé sur tout son pourtour par une coque ininterrompue de tissu compacte. Pour les os plats de la boite crânienne, les deux lames de tissu compacte prennent le nom de tables (table interne et table externe) ; le tissu spongieux, compris entre les deux lames, prend celui de diploé.
Le tissu spongieux des os plats présente généralement son maximum d’épaisseur au voisinage des bords. De là, il s’atténue graduellement en allant vers le centre et parfois même disparaît complètement. Dans ce dernier cas, les deux tables de tissu compacte se fusionnent, à la partie centrale de l’os, en une lame unique qui, sur certains os, est mince et transparente : telle est la disposition que l’on rencontre au centre du scapulum et à la partie moyenne de la fosse iliaque.
Sur certains points du tissu spongieux des os plats se voient de larges canaux, à contours irréguliers et plus ou moins sinueux, qui vont constamment s’ouvrir sur l’une ou l’autre de ses deux faces : ce sont des canaux veineux, comblés à l’état frais par des veines de mêmes dimensions, qui ramènent au torrent circulatoire général le sang veineux de l’os. Ces canaux veineux présentent leur maximum de développement dans les os du crâne. Leur paroi, formée par une mince lame de tissu compacte, est comme criblée de petits orifices, à travers lesquels passent les veines et veinules tributaires du canal veineux principal.
Conformation intérieure des os courts
Les os courts présentent, dans leur conformation intérieure, la plus grande analogie avec les épiphyses des os longs. Comme ces derniers, ils se composent d’une masse centrale de tissu spongieux, enveloppée sur tout son pourtour, les surfaces articulaires exceptées, par une mince coque de tissu compacte.
Les os courts comme les os plats possèdent des canaux veineux souvent très développés. Les corps vertébraux nous offrent un exemple très net de cette disposition.
A première vue, les travées osseuses qui constituent la portion spongieuse des os courts paraissent être irrégulières et disposées sans ordre aucun.
Mais, à un examen plus attentif et sur des coupes heureuses, on constate qu’il n’en est rien, que ces travées, au contraire, se disposent suivant un type particulier qui est constant pour le même os. C’est ainsi que dans l’astragale (fig. 4) nous voyons les travées osseuses se partager en deux groupes, les unes se dirigeant obliquement en bas et en avant, les autres se portant obliquement en bas et en arrière. De même, dans le calcanéum, nous voyons les fibres antérieures se porter obliquement en bas et en avant, les fibres postérieures se porter obliquement en bas et en arrière, etc. Une telle systématisation des travées osseuses dans les os courts, sur laquelle MEYER et WOLF ont depuis longtemps déjà appelé l’attention, est en rapport avec le rôle spécial qui est dévolu à ces os dans la locomotion, et on peut établir en principe que les travées osseuses suivent toujours la même direction que les forces qu’elles ont à supporter. Leur résistance en est ainsi considérablement accrue. Nous aurons à revenir plus tard sur cette question à propos des os du pied.